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Article basé sur l’ouvrage éponyme par Guillaume Declair, Bao Dinh et Jérôme Dumont)

La vie est courte. Le travail, censĂ© ĂŞtre un moyen de vivre bien et non une fin en soi, et ĂŞtre en outre aujourd’hui facilitĂ© par les nouvelles technologies, semble pourtant stagner dans une dynamique de surenchère, de dĂ©bordement, et le burn-out est dĂ©sormais une notion parfaitement intĂ©grĂ©e Ă  notre quotidien. L’une des raisons identifiables est la mauvaise utilisation des outils et mĂ©thodes de travail Ă  disposition qui nuit Ă  leur efficacitĂ©, et une certaine apathie doublĂ©e d’impatience qui rend rĂ©fractaire Ă  changer ses habitudes pour un rĂ©sultat Ă  long terme ou progressif plutĂ´t qu’une rĂ©volution instantanĂ©e des rĂ©sultats. Il faut donc revoir notre façon de penser l’efficacitĂ© et le succès, et viser Ă  de petits changements qui pourront paraĂ®tre insignifiants (gagner deux ou trois minutes par jour) mais qui cumulĂ©s reprĂ©senteront cette vingt-cinquième heure (de dĂ©tente, de partage avec les siens, de sommeil…) qui semble toujours manquer dans chaque journĂ©e de travail. C’est partant de ce constat d’évidence mais très concret que les trois auteurs ont posĂ© cette question simple Ă  plus de 300 entrepreneurs dans le monde entier : « qu’est-ce qui vous fait chaque jour gagner le plus de temps ? Â». L’ensemble des rĂ©ponses reçues et de leur application concrète par ces trois entrepreneurs performants s’est ainsi organisĂ© en trois grandes orientations : s’organiser (pour allouer suffisamment de temps Ă  chaque tâche), se concentrer (pour dĂ©dier la juste attention Ă  chaque tâche ou problème) et accĂ©lĂ©rer (pour rĂ©duire le temps d’exĂ©cution de chaque tâche ou solution).

S’organiser

Il s’est passĂ© 8000 ans entre la rĂ©volution agricole et la première rĂ©volution industrielle, mais 90 ans entre l’invention de l’ampoule et le premier voyage sur la lune, puis seulement 22 ans entre ce dernier et l’invention d’Internet et 9 ans entre la crĂ©ation d’Internet et le sĂ©quençage total de l’ADN. Plus encore, l’adoption des nouveaux outils technologiques n’a jamais Ă©tĂ© si rapide : le tĂ©lĂ©phone fixe a mis 80 ans Ă  atteindre 80% des pĂ©nĂ©tration mondiale, mais le portable seulement 30 et le smartphone 10. Dans ce contexte d’évolution dĂ©lirante Ă  laquelle les entreprises doivent s’adapter en permanence, les plans Ă  long terme n’ont plus aucun sens, et c’est une organisation de la pensĂ©e et de la façon de travailler valable en toutes circonstances qui doit ĂŞtre mise en place et intĂ©grĂ©e pour avoir le temps et l’énergie de se consacrer Ă  ces dĂ©fis constants.

La puissance du « non Â»

La productivitĂ©, ce n’est pas faire beaucoup de choses, c’est faire ce qui est utile en un minimum de temps et d’effort. Dire oui trop souvent (pour Ă©tudier une idĂ©e, pour assister Ă  une rĂ©union, pour vous charger d’une tâche qui ne vous est pas dĂ©volue) est souvent le symptĂ´me d’un manque de dĂ©finition claire et prĂ©cise de votre rĂ´le et de vos objectifs. Il est ainsi important de savoir se situer, et de refuser les sollicitations qui n’entrent pas dans le cadre de votre perspective. Une autre raison Ă  cette disponibilitĂ© excessive se trouve Ă©galement dans le besoin naturel de plaire et la crainte de vexer, blesser ou dĂ©cevoir vos interlocuteurs. Il faut donc bien prendre conscience de ce qu’accepter quelque chose malgrĂ© vous, que vous ne voulez pas faire ou n’êtes parfois mĂŞme pas en mesure de faire correctement, n’est pas une marque de respect ou de sympathie mais une source de rancĹ“ur et mĂŞme un danger, puisque si vous diffĂ©rez la « dĂ©ception Â», elle viendra lorsque vous effectuerez mal ou Ă  contre-cĹ“ur la tâche demandĂ©e. Dire non en expliquant son refus est beaucoup plus respectueux, et indique Ă  votre interlocuteur que vous avez Ă©coutĂ© et analysĂ© son besoin et que vous le respectez suffisamment pour ne pas lui faire perdre de temps ou bâcler le travail. Le secret est de ne pas vous focaliser sur le refus en lui-mĂŞme mais de bien en expliciter les raisons, et fermetĂ© ne signifie pas arrogance ou rejet : on peut – on doit – toujours dire non « gentiment Â». Ă€ chaque sollicitation, demandez-vous toujours :

  • est-ce indispensable ?
  • est-ce utile dans le cadre de mes objectifs et de mon rĂ´le tel que je les dĂ©finis ?
  • suis-je la personne la plus Ă  mĂŞme de le faire / la seule personne Ă  pouvoir le faire ?

Il vaut mieux perdre cinq minutes à justifier un refus que deux ou trois heures à faire quelque chose qu’on ne sait pas faire ou qu’on n’a pas besoin de faire.

Abusez de la « to-do list Â»

Lorsqu’on a beaucoup de choses diffĂ©rentes Ă  accomplir, on se sent vite submergĂ© et ces pensĂ©es parasitent la motivation et l’organisation. Le fait de noter systĂ©matiquement les choses Ă  faire sous forme de listes permet d’abord de cesser d’y penser en boucle en supprimant la crainte d’oublier quelque chose. Cela permet Ă©galement d’assurer le suivi de l’accomplissement et d’évaluer la productivitĂ© de façon concrète, et ajoute une dimension d’engagement en couchant cette obligation sur le papier. Choisissez un support constant (post-it, carnet, application dĂ©diĂ©e dans votre PC…) et tenez-vous y. RĂ©digez vos listes avec des verbes d’action, et surtout en dĂ©crivant assez prĂ©cisĂ©ment la tâche et son rĂ©sultat escomptĂ©, ce dernier point renforçant la motivation puisque le rĂ©sultat est toujours plus agrĂ©able que la tâche elle-mĂŞme (par exemple, ne notez pas juste « dossier Dubois Â» mais « Ă©tudier la radio Dubois et dĂ©finir les deux solutions les moins douloureuses et les plus Ă©conomiques pour lui pour qu’il signe un plan de traitement Â».)

La règle des deux minutes

C’est une règle simple et d’une efficacité redoutable. Chaque fois que vous rédigez votre to-do list, si une tâche prend moins de deux minutes, faites-la plutôt que de la noter. Tout de suite. Vous vous rendrez très vite compte que beaucoup d’obligations qui viennent plomber votre élan et allonger vos listes sont en fait des micro-tâches qui pour ennuyeuses qu’elles puissent être, sont en fait si courtes à réaliser que vous perdez plus de temps à les écrire ou à les relire qu’à vous en débarrasser immédiatement.

Déléguez, déléguez, déléguez

Il existe trois phrases Ă  bannir de son Ă©tat d’esprit :

« Si je veux que ce soit bien fait, il faut que je le fasse moi-mĂŞme Â».
« Ă‡a ira plus vite si je le fais moi-mĂŞme Â».
« C’est une tâche ingrate, je dois montrer l’exemple et le faire moi-mĂŞme Â».

Toutefois, dĂ©lĂ©guer ne signifie pas se dĂ©barrasser, et nĂ©cessite si ce n’est pas au dĂ©part votre habitude un investissement de temps (qui sera capitalisĂ© sur le temps gagnĂ© par la suite) afin de former correctement les personnes Ă  qui vous dĂ©lĂ©guez. Cela implique Ă©galement un peu d’humilitĂ©, et d’accepter le fait que vous n’êtes pas irremplaçable ou le seul Ă  pouvoir accomplir certaines tâches. Au-delĂ  de la formation, il est en effet important Ă©galement de ne pas verser dans le micro-management : vous dĂ©lĂ©guez un rĂ©sultat attendu dans un dĂ©lai clair, mais vous ne devez pas imposer les moyens d’atteindre ce rĂ©sultat. Faites un peu confiance Ă  vos Ă©quipes â€“ et n’oubliez pas de les remercier et de prendre le temps de donner un feedback, tĂ©moin de l’attention que vous portez au travail accompli et de la valeur et de la confiance que vous accordez Ă  l’exĂ©cutant.

Priorisez

Concrètement, l’image la plus parlante de la hiĂ©rarchisation des tâches dans une journĂ©e est celle de la jarre et des cailloux, initiĂ©e par Stephen Covey. Imaginez devoir remplir une jarre avec trois grosses pierres, une dizaine de cailloux et une poignĂ©e de sable. Si vous commencez par le sable au fond puis les cailloux, il y a de fortes chances que les grosses pierres ne rentrent plus. En revanche, si vous allez du plus gros au plus petit, cela fonctionne : les trois grosses pierres une fois calĂ©es, les cailloux se glisseront dans les espaces libres et le sable se faufilera dans le moindre interstice disponible jusqu’au fond de la jarre. De mĂŞme, chaque jour, prĂ©voyez les trois tâches les plus importantes et urgentes, programmez le temps nĂ©cessaire Ă  leur accomplissement de A Ă  Z (pas d’interruption), puis calez progressivement le reste des tâches urgentes mais moins importantes (les cailloux), puis importantes mais non urgentes (le sable).

La programmation des tâches avec une durĂ©e prĂ©cise s’appelle en management le « timeboxing Â». Ces crĂ©neaux prĂ©dĂ©finis permettent en fait d’éviter le report ou l’interruption de la tâche en la fixant comme un « rendez-vous avec soi-mĂŞme Â». Une erreur courante est d’inscrire Ă  son agenda uniquement les rendez-vous et rĂ©unions, ce qui entraĂ®ne un dĂ©roulement rĂ©el de la journĂ©e dictĂ© par l’extĂ©rieur et non rĂ©flĂ©chi (lecture du courrier et des mails et rĂ©ponses immĂ©diates, tĂ©lĂ©phone, sollicitations…). Visualiser ces tâches comme le sable Ă  caler dans le temps qui reste et les planifier effectivement permet d’en reprendre le contrĂ´le.

Enfin, dans l’ordre de traitement des tâches, pensez Ă  initier les tâches passives (par exemple briefer un collaborateur, tĂ©lĂ©charger un fichier lourd, solliciter une information administrative ou autre longue Ă  arriver, « l’allumage du four Â» en cuisine) en premier, afin que le temps d’attente subsĂ©quent puisse ĂŞtre utilisĂ© Ă  autre chose qu’à attendre.

Combattez la procrastination

La procrastination est inscrite dans l’ADN humain et n’est pas un fantasme ou une excuse mais bien une rĂ©alitĂ© biologique : lorsque nous obtenons satisfaction, le cerveau libère de la dopamine, qui gĂ©nère une sensation agrĂ©able de gratification immĂ©diate. C’est pourquoi la perspective d’accomplir quelque chose qui nous ennuie ou une obligation dĂ©sagrĂ©able, ou dont le rĂ©sultat s’inscrit dans la durĂ©e et n’est pas immĂ©diatement perceptible, crĂ©e un mĂ©canisme de dĂ©fense instinctif : la procrastination.

La première mĂ©thode Ă©prouvĂ©e pour tenter de contourner le rĂ©flexe de rejet face Ă  une tâche imposante est le dĂ©coupage en micro-tâches plus abordables envisagĂ©es individuellement. Par exemple, plutĂ´t que de vous dire « je vais Ă©crire un livre Â» et vous dĂ©courager devant l’ampleur de la tâche avant mĂŞme d’avoir commencĂ©, visualisez chaque chapitre comme une poignĂ©e de sable, et insĂ©rez une ou deux pages dans votre jarre tous les jours. Ne vous surchargez pas avec les tâches annexes, que vous visualiserez comme les barreaux d’une Ă©chelle, c’est-Ă -dire un par un. Une fois le livre achevĂ©, vous monterez le barreau « mise en page Â», puis le barreau « maquette Â», puis le barreau « Ă©dition Â» …

Deux autres rĂ©flexes ont fait leur preuves dans ce combat contre la procrastination : la deadline auto-imposĂ©e (si vous voulez prĂ©parer la prĂ©sentation du plan de traitement de Monsieur X, fixez-lui rendez-vous sans attendre qu’elle soit prĂŞte, si vous voulez Ă©crire un livre, annoncez Ă  vos proches que vous leur ferez lire le premier chapitre le 15 du mois etc..) et la première seconde (le plus dur, ce n’est gĂ©nĂ©ralement pas l’accomplissement de la tâche en soi mais de s’y atteler). Sortez votre feuille et votre stylo ou votre traitement de texte, et rĂ©digez, mĂŞme mal, les premières lignes de votre prĂ©sentation ou de votre livre, tout de suite, en transformant l’habituel dĂ©lai « cafĂ© Â», « e-mails Â», « juste une minute sur Facebook Â» en rĂ©compense a posteriori. N’hĂ©sitez jamais Ă  rendre vos tâches plus attrayantes en vous accordant des compensations durant leur accomplissement (confort du poste de travail, musique ou grignotage si le contexte le permet…)

Se concentrer

Le règne de l’open-space, la démocratisation des outils de communication avancés et l’explosion de la production d’informations et de contenus entraîne aujourd’hui un déficit d’attention et d’assiduité qui est l’une des principales causes du manque de productivité. Il est donc important d’en prendre conscience et d’agir à la racine du problème, en éliminant ce qui nuit à la concentration et la continuité des tâches.

Chassez les pensées parasites

Le « nuage noir Â» des pensĂ©es parasites est, avant mĂŞme les parasites extĂ©rieurs, l’une des causes premières de la dĂ©concentration. Notre attention se porte rarement Ă  100% sur ce que nous sommes en train de faire mais dĂ©rive vers tout ce qui reste Ă  faire et qu’il ne faut pas oublier : rendez-vous, relances, corvĂ©es… Il existe pourtant nombre d’outils permettant de se dĂ©charger de ces craintes d’oubli qui empoisonnent la concentration. Les alertes de rappels prĂ©-programmables sur l’intĂ©gralitĂ© des agendas en ligne sont par exemple un excellent complĂ©ment Ă  la to-do list permettant d’être sĂ»r que rien ne sera oubliĂ© ni aucune deadline dĂ©passĂ©e sans avoir Ă  y consacrer une attention permanente.

Le tri et l’évitement de l’accumulation sont Ă©galement indispensables Ă  la sĂ©rĂ©nitĂ© nĂ©cessaire Ă  une bonne concentration. Une boĂ®te mail saturĂ©e, un bureau en dĂ©sordre sont un rappel constant qu’il y a plus de choses Ă  faire que de tâches accomplies. Rangez ce dont vous n’avez pas besoin, videz votre boĂ®te de rĂ©ception en classant vos mails en sous-dossiers dès leur lecture (par exemple « traitĂ©s Â», « to-do list Â» si vous n’avez pas le temps de rĂ©pondre immĂ©diatement et… corbeille pour le reste !).

Protégez-vous des tentations

Les nouveaux mĂ©dias, outils de type smartphones et rĂ©seaux sociaux sont pensĂ©s pour vous faire les utiliser. C’est pourquoi l’autodiscipline peut s’avĂ©rer particulièrement dĂ©licate et qu’il vaut mieux, si vous ne vous montrez pas capable de vous tenir Ă  vos « cinq minutes Â» auto-accordĂ©es durant une pause programmĂ©e, supprimer totalement la tentation. Plusieurs outils et solutions sont envisageables, du casier pour les addicts au smartphone aux outils de blocage de type contrĂ´le parental ou applications comme Freedom (qui interdit l’accès aux sites choisis durant un temps prĂ©dĂ©terminĂ© non modifiable une fois paramĂ©trĂ©).

Créez votre bulle

Sans virer ermite ou asocial, il est important, lors des timeboxes que vous vous êtes bloquées pour avancer sur vos trois grosses pierres, de bien affirmer votre besoin d’espace et de concentration. Les écouteurs peuvent être une solution, en ce qu’à la fois ils vous isolent de votre environnement et vous permettent, avec une musique bien évidemment adaptée de type instrumental et léger ou un fond sonore de relaxation, de vraiment focaliser votre attention, et en ce qu’ils déclarent aux éventuels interrupteurs que vous êtes occupé, et créent une barrière artificielle mais concrète qui ne sera pas franchie à moins d’une vraie urgence.

Envisager une demi-journée de travail à l’extérieur du bureau (dans un café, dans la nature, en bord de mer…) pour les tâches administratives par exemple peut également faire des miracles, le changement d’environnement pouvant booster la motivation et la créativité, de même qu’une alternance entre travail au cabinet / bureau et travail à la maison, sous réserve encore une fois de planifier un emploi du temps réfléchi et non pas de transformer son café préféré ou son foyer en annexe du bureau. Il ne s’agit pas de faire plus, mais de faire autrement, pour faire mieux.

Passez aux communications asynchrones

L’ennemi principal de la productivitĂ© est la communication synchrone, c’est-Ă -dire la communication classique oĂą les deux interlocuteurs Ă©changent des informations au mĂŞme moment. Cette communication (tĂ©lĂ©phonique, physique, Ă©lectronique en Ă©change instantanĂ©) doit ĂŞtre rĂ©servĂ©e Ă  seulement deux cas de figure :

  • le sujet ne peut ĂŞtre rĂ©glĂ© en moins de trois Ă©changes asynchrones (trois emails ou messages vocaux par exemple)
  • les vraies urgences (panne technique, patient en dĂ©sarroi, incident…)

Dans tous les autres cas, un Ă©change diffĂ©rĂ© permet de prĂ©voir et d’estimer les crĂ©neaux nĂ©cessaires au traitement des informations, et donc d’éviter les interruptions, la prĂ©cipitation engendrant souvent des oublis ou rĂ©ponses tronquĂ©es, et la perte de maĂ®trise sur sa planification. Imposez-vous une discipline stricte quant aux appels tĂ©lĂ©phoniques (qui arrangent souvent l’appelant mais pas forcĂ©ment l’appelĂ©) ou Ă  la rapiditĂ© de rĂ©ponse aux emails (vous n’êtes pas choquĂ© d’attendre trois ou quatre heures voire une journĂ©e une rĂ©ponse Ă  la plupart de vos mails ? Eh bien c’est la mĂŞme chose pour vos patients et contacts, votre rĂ©ponse peut attendre son crĂ©neau prĂ©vu pour cela), ainsi que face aux collaborateurs et patients « bavards Â», qu’il convient de canaliser gentiment, mais fermement. Afin de limiter la pression et la tentation, et de ne pas donner de « mauvaises habitudes Â» Ă  vos interlocuteurs, ne consultez pas vos messages plus de trois fois par jour, et jamais en-dehors des heures de travail.

Dites stop aux notifications

Toujours dans une optique de maîtrise des interruptions et tentations, même si cela peut sembler évident, n’oubliez pas de désactiver et de limiter au maximum les notifications entrantes, qu’il s’agisse de mails, de sms, mais aussi de toutes ces applications annexes que nous utilisons au quotidien et qui se rappellent à nous via smartphone ou ordinateur durant la journée. Chaque fois que vous installez une nouvelle application, définissez par défaut les notifications au strict minimum une fois pour toutes, et ne négligez pas le mode avion lorsque vous êtes en session de travail. De même pensez à vous désabonner des newsletters inutiles plutôt que de les supprimer à réception.

AccĂ©lĂ©rer : le « FAST Â»

Imaginez qu’il est 19H30, vous ĂŞtes seul dans votre cuisine avec vos sacs de courses et quinze amis sont en route pour dĂ®ner avec vous dans une heure. Vous devez Ă©videmment vous organiser (mettre en route les tâches passives comme allumer le four ou dĂ©congeler la viande) et vous concentrer (en Ă©cartant votre portable et en Ă©teignant la tĂ©lĂ©vision), mais cela ne suffira pas : il faut maintenant accĂ©lĂ©rer substantiellement votre temps d’exĂ©cution. Pour cela, quatre concepts sont essentiels, regroupĂ©s sous l’acronyme FAST (rapide en anglais) :

« Fundamentals Â» : les bonnes conditions de dĂ©part

On ne part pas en randonnĂ©e après une nuit blanche ou une sĂ©ance de sport intensive, on n’abat pas un arbre avec une hache Ă©moussĂ©e. Les fondamentaux, c’est-Ă -dire la prĂ©paration et une condition physique et Ă©motionnelle optimale, sont ainsi les prĂ©requis Ă  la productivitĂ©, quelle que soit la mĂ©thode appliquĂ©e. Du repos, une hygiène de vie correcte, de l’exercice, le respect de votre rythme biologique sont autant de dĂ©cisions impactant votre efficacitĂ© professionnelle et votre Ă©tat d’esprit. Ne considĂ©rez pas le temps passĂ© Ă  prendre soin de vous comme du temps perdu : c’est du temps investi qui se capitalisera par une productivitĂ© accrue et donc une rapiditĂ© d’exĂ©cution plus importante.

Les conditions matérielles d’exécution sont également un élément fondamental de l’efficacité. Un ordinateur qui vous fait perdre dix minutes par jour à cause d’une vitesse de chargement limitée, du matériel qui tombe en panne ou fonctionne au ralenti, un logiciel confus ou à l’utilisation redondante peuvent représenter une perte de temps (et donc de productivité, et donc de bénéfice) plus importante que vous ne le pensez. C’est pourquoi il ne faut pas lésiner sur la qualité du matériel utilisé quotidiennement. Pour mieux évaluer l’opportunité de vos investissements, chiffrez simplement la valeur concrète d’une heure de votre travail et estimez les gains de temps concrets à long terme de chaque solution sur cette base. Vous vous rendrez ainsi compte que si ce taxi à 15 euros le trajet vous fait gagner deux heures de transport ou cet ordinateur à 1000 euros une demi-heure d’attente totale par jour devant votre écran, ils sont ainsi amortis en très peu de temps et vous feront gagner plus à long terme.

« Automation Â» : l’automatisation des actions rĂ©currentes

C’est la règle d’or de la productivitĂ©, quel que soit votre secteur d’activitĂ© : si vous effectuez une tâche ou une action plus d’une fois (par jour, par mois, par an…), il faut trouver un moyen de l’automatiser. Ă€ l’heure actuelle, les outils numĂ©riques proposent de nombreuses options d’automatisation du traitement des Ă©changes dont beaucoup sont nĂ©gligĂ©es alors qu’elles peuvent vous faire gagner chacune plusieurs minutes par jour et vous soulager de beaucoup d’actions fastidieuses et pensĂ©es parasites :

  • laissez votre ordinateur remplir les formulaires. La plupart des logiciels externes ou mĂŞme simplement des solutions d’enregistrement de vos informations par votre navigateur sont ultra-sĂ©curisĂ©s. Plus la peine de passer dix minutes Ă  remplir vos informations ou de perdre du temps Ă  chercher votre carte bancaire. Des outils comme Dashlane ou 1Password vous permettent mĂŞme de regrouper et appliquer tous vos identifiants et mots de passe, vous laissant ainsi un seul mĂ©ta-mot de passe Ă  retenir pour l’ensemble de votre navigation.
  • laissez votre ordinateur traiter et trier vos mails. La plupart des boĂ®tes mail (notamment Gmail ou Outlook, très performantes sur ce point) vous permettent un tri un amont en classant directement les courriels entrants soit par couleur soit dans des dossiers dĂ©diĂ©s, vous permettant d’en estimer l’urgence et l’importance en un coup d’œil en fonction de l’expĂ©diteur, du sujet etc. Les outils de rĂ©ponse automatique en fonction d’un mot ou groupe de mots prĂ©sents dans le message se dĂ©mocratisent Ă©galement (par exemple message automatique de refus poli pour toutes les demandes provenant d’expĂ©diteurs hors entreprise et contenant « demande de stage Â» ou « candidature spontanĂ©e Â» si vous ne recrutez pas). Des outils comme Mixmax dĂ©cuplent les possibilitĂ©s de votre boĂ®te mail existante, en permettant par exemple l’envoi de messages programmĂ©s en diffĂ©rĂ© ou de rappel automatique Ă  dĂ©faut de rĂ©ponse.
  • laissez votre ordinateur gĂ©rer vos process. De nombreux outils de plus en plus perfectionnĂ©s permettent l’automatisation des communications rĂ©pĂ©titives et informatives ou le tri et classement automatique de beaucoup d’élĂ©ments diffĂ©rents (factures, dossiers) dĂ©gageant du temps et de l’attention pour les tâches ou Ă©changes rĂ©ellement importants. L’intelligence artificielle progresse Ă©galement, et « perdre Â» quelques heures Ă  apprivoiser la reconnaissance vocale (dicter ses messages plutĂ´t que les taper, puisqu’on parle toujours plus vite qu’on n’écrit), la dactylographie numĂ©rique, ou des assistants virtuels comme JulieDesk (qui peut par exemple fixer seul un rendez-vous en analysant votre planning, en tenant compte de vos prĂ©fĂ©rences de lieux prĂ©enregistrĂ©es et en proposant directement des crĂ©neaux Ă  votre interlocuteur) peut se rĂ©vĂ©ler extrĂŞmement rentable Ă  long terme.

« Speed Â» : l’accĂ©lĂ©ration d’exĂ©cution des tâches

L’automatisation va s’étendre Ă  la substance mĂŞme des tâches rĂ©pĂ©titives en accĂ©lĂ©rant les gestes concrets Ă  effectuer et leur nombre. Par exemple :

  • analysez le temps passĂ© sur chaque application, site ou logiciel grâce Ă  un outil comme RescueTime qui mesure le temps passĂ© sur chaque interface. RepĂ©rez les visites les plus chronophages et les raisons de ces durĂ©es, pour rĂ©flĂ©chir aux moyens de les rĂ©duire.
  • n’hĂ©sitez pas Ă  vous perfectionner en dactylographie pour amĂ©liorer votre vitesse de frappe, ou Ă  utiliser des logiciels de dictĂ©e performants.
  • usez et abusez des modèles prĂ©dĂ©finis (actes, dossiers, courriers) et raccourcis ; par exemple, des options de rĂ©daction intuitive dans la plupart des boĂ®tes mails et traitements de texte vous permettent de remplacer automatiquement les deux ou trois premières lettres d’une phrase par la phrase entière, ce qui est pratique lorsque vous utilisez rĂ©gulièrement des formulations similaires ou donnez des informations rĂ©currentes comme adresse, horaires, formules de politesse, numĂ©ros Ă  rallonge comme la sĂ©curitĂ© sociale ou l’IBAN, SIRET etc.
  • pensez gĂ©nĂ©ralement au gain de temps sur la durĂ©e, et pas seulement immĂ©diat, et ne tombez pas dans le piège de perdre un temps fou par manque de clartĂ© ou de prĂ©cision pour avoir voulu gagner quelques secondes / minutes. L’exemple typique de ce travers est « l’échange ping-pong Â» par mail, de type :

« Voici la prĂ©sentation de plan de traitement de Monsieur X.

  • Bien reçu.
  • J’attends tes commentaires.
  • Ah… sur le fond ou sur la forme ?
  • Les deux !
  • Il y a une erreur page 4.
  • Voici la version corrigĂ©e.
  • Parfait pour moi.
  • Super, peux-tu transmettre Ă  Y qui doit la prĂ©senter au patient ?
  • Copie du message de transmission Ă  Y Â».

Vous avez envoyĂ© et reçu 10 emails, qui mĂŞme s’ils ont demandĂ© moins de temps de rĂ©flexion et de rĂ©daction reprĂ©sentent tout de mĂŞme 5 tâches Ă  part entière + 5 Ă©lĂ©ments Ă  traiter, alors que si vous aviez dit :

« Voici la prĂ©sentation de plan de traitement de Monsieur X. Si c’est OK, merci de l’envoyer Ă  Y qui doit la prĂ©senter au patient, sinon me prĂ©ciser ce qui doit ĂŞtre revu.

  • Il y a juste une erreur page 4
  • Version corrigĂ©e ci-jointe.
  • Copie du message de transmission Ă  Y Â».

Vous évitiez 6 des interruptions / tâches pour le même résultat.

  • privilĂ©giez les raccourcis clavier, très simples une fois l’habitude prise et beaucoup plus rapides que l’utilisation de la souris pour beaucoup d’actions courantes (couper, copier, coller, insertion de caractères spĂ©ciaux…), et Ă©galement fort pratiques dans des programmes comme Excel ou Google Sheets (changer de case, rĂ©pĂ©ter une action…), la plupart des boĂ®tes mails (rĂ©pondre, archiver, transfĂ©rer…) et des navigateurs (ouvrir/fermer un onglet, rouvrir onglet fermĂ© par erreur, passer d’un onglet Ă  l’autre ou placer le curseur dans la barre de recherche…)

« Twenty-eighty rule Â» : 20% des efforts pour 80% de l’impact

Le principe dit de Pareto selon lequel (en moyenne) 20% des causes produisent 80% des effets est valable en tout temps, en tout lieu et dans n’importe quel domaine. Si vous savez dĂ©jĂ  par exemple que 20% des patients gĂ©nèrent 80% du chiffre d’affaire ou que 20% des dysfonctionnements sont responsables de 80% des problèmes, c’est la mĂŞme chose pour votre gestion du temps et votre organisation : seuls 20% de vos actions, idĂ©es, processus, mĂ©thodes vont ĂŞtre Ă  l’origine de 80% de votre efficacitĂ©. Il est donc important de monitorer vos rĂ©sultats et de concentrer vos efforts principaux sur ce qui fonctionne, sans perdre de temps avec des dĂ©tails insignifiants ou des gains vraiment trop minimes.

Pour conclure, il est bon d’avoir en tĂŞte l’objectif profond de cette recherche d’efficacitĂ©, autrement dit ce que l’on veut faire concrètement de cette « vingt-cinquième heure Â» gagnĂ©e sur notre temps de travail. On en revient toujours Ă  la notion de bonheur et d’épanouissement personnel, et il ne s’agit pas de gagner du temps pour travailler et gagner plus, mais bien pour vivre mieux, ce qui ne passe pas nĂ©cessairement par une augmentation du revenu mais peut-ĂŞtre plutĂ´t par plus de tranquillitĂ© d’esprit et de disponibilitĂ© (une meilleure organisation, plus de concentration et d’efficacitĂ©, c’est moins de stress, plus de plaisir au travail, plus de temps libre pour ses passions externes, ses proches, sa santé…). Une Ă©tude a montrĂ© qu’au-delĂ  de 75 000 $ (environ 66 000 euros) de revenu annuel, la sensation de bonheur se fait plus illusoire voire diminue proportionnellement Ă  l’augmentation des revenus. Un revenu confortable, c’est celui qui vous permet de vivre, de gâter vos proches, de vous soigner, de faire face aux dĂ©penses imprĂ©vues et aux loisirs sans inquiĂ©tude du lendemain. Au-delĂ , il s’agit souvent de paraĂ®tre, ou de compenser des manques Ă©motionnels ou psychologiques rarement compensables par le matĂ©riel. Historiquement, ce n’est que depuis la rĂ©volution industrielle que le travail, et en fait moins hypocritement le revenu du travail et par extension le confort matĂ©riel, a Ă©tĂ© Ă©rigĂ© en valeur absolue. De tous temps, le travail a Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme une nĂ©cessitĂ© annexe voire une punition, et les valeurs importantes celles de la culture, de la vie sociale ou familiale, de la spiritualité… Attelez-vous donc Ă  optimiser votre efficacitĂ© non pour produire et engranger plus, mais pour travailler moins et mieux. Personne ne dit sur son lit de mort : « j’aurais tellement aimĂ© passer plus de temps au bureau… Â»