Bonjour Ă tous,
Je vous propose de parler littérature dans la domaine de la gestion du cabinet dentaire, et de commencer par un grand auteur dans ce domaine : le Docteur Edmond Binhas et son livre sur la gestion globale du cabinet dentaire, voila une présentation du contenu du livre.
En France, les jeunes odontologistes sont formés comme des salariés, alors qu’ils deviendront majoritairement des libéraux. Edmond Binhas, l’auteur de l’ouvrage, pose ici les bases de l’organisation d’un cabinet en libéral : le patient doit être au centre de l’organisation d’un cabinet dentaire (pas de marchandisation de la santé), mais le bien-être du praticien est une nécessité. Voici ses enseignements.
Partie I : apprendre à gérer le «cabinet-entreprise»
1- Changement d’époque : le chirurgien dentiste chef d’entreprise de santé
Accepter la réalité économique est devenu une question de survie. Si les techniques s’améliorent, le revenu des praticiens baisse. Parfois, ils font même faillite. La gestion des cabinets est un nouveau défi, et « gérer » ne se résume pas à rencontrer son expert-comptable deux fois par an. Par ailleurs, pratique dentaire et gestion d’entreprise de santé sont parfaitement compatibles.
Définissons d’abord ce qu’est une profession. Celle-ci régule elle-même ses propres standards de formation et fournit des services utiles à la société. Les membres d’une profession possèdent un savoir-faire théorique, ont besoin d’une formation spécialisée et préfèrent le service au profit.
Définissons ensuite ce qu’est une entreprise : un capital est obtenu, des biens et des services sont produits et distribués à des consommateurs désireux de les acheter, la production et la vente de ces produits et services aboutissent à un bénéfice, et il y a risque financier. Le bénéfice n’est pas un objectif en soi, mais un indicateur de la bonne santé de l’entreprise, et donc de la qualité du produit ou service fourni. Il faut répondre à un besoin du public, améliorer les prestations (suivre les dernières techniques et technologies) , satisfaire aux besoin de tous (des patients –de plus en plus exigeants- aux créanciers), obtenir un revenu équitable et survivre à long terme. Il faut planifier ses finances et s’attribuer un revenu correct. Bien géré, un cabinet rapporte plus qu’un placement.
Le cycle de vie d’un cabinet comprend cinq étapes : le démarrage (priorité : solder ses dettes) , la croissance (priorité : planifier à long terme), le plateau (priorité : faire le point), la transition (priorité : définir si on développe ou limite la patientèle) et la retraite.
Concurrence et explosion du système de santé sont à prendre en compte. Aujourd’hui, le nombre des nouveau chirurgiens-dentistes ne compense plus les départs en retraite. La profession vieillit, le salariat augmente avec la féminisation. La Sécurité sociale rembourse de moins en moins les soins et les frais professionnels augmentent. Les professionnels manquent de visibilité et sont freinés par la peur du changement, une vision datée de problèmes nouveaux, des préssuposés (exemples de ces idées fausses : la dentisterie est un besoin, le chirurgien dentiste est au service de la population, l’aptitude clinique est suffisante…). Ils souffrent aussi de la rupture technologique et de la rupture démographique, sociale et de communication.
Les quatre lois d’un cabinet dentaire sont : un cabinet se développe ou décline, la technologie va toujours plus vite, c’est toujours moins cher ailleurs, et il faut communiquer.
Pour mettre le patient (surinformé et en demande de confiance) au cœur du système, il faut optimiser les aspects relationnels (tâche paraissant faussement facile), s’engager auprès du patient, respecter ses droits, et le faire coopérer. Il faut être disponible, à l’écoute. Cela passe souvent par une bonne gestion du stress.
Le recrutement d’une assistante dentaire (qui aide aux actes cliniques complexes, assure une présence physique au cabinet, accueille le patient, instaure la confiance et la connivence, augmente le niveau de services, optimise l’hygiène et permet de gagner du temps) est un investissement à envisager. Un bon recrutement comprend trois entretiens. Il faut ensuite former, déléguer, puis contrôler le travail effectué.
2- Gérer c’est prévoir
Il faut savoir ce que l’on veut, planifier (définir la philosophie, les objectifs, la politique, les méthodes, le budget prévisionnel). Le présent compte moins que l’avenir. Apprendre, c’est passer par quatre phases : l’incompétence inconsciente (l’immaturité), l’incompétence consciente (la confrontation à la réalité), la compétence consciente (le travail) et la compétence inconsciente (le temps –dangereux- des automatismes).
Un cabinet, d’après l’Etat, est aussi une entreprise. Tous les ans, il faut faire un bilan comptable général. Les gestions « au rétroviseur » ou au jour le jour sont inadaptées. Il faut une gestion prévisionnelle : la maturité d’un cabinet se mesure à l’anticipation, à la qualité des outils de mesure, au traitement des informations obtenues. Il faut faire un plan financier prévisionnel, tenir une comptabilité (avec suivi du chiffre d’affaires, des bénéfices, des charges, de la rentabilité, de l’évolution des délais de paiement, des factures dues). Une comptabilité analytique est encore plus précise. Il faut enfin gérer: calculer les coûts de production, surveiller ses dépenses et investissements. Il faut enfin contrôler son cabinet, par exemple avec un tableau de bord, et ne pas tout attendre de son comptable. Experts et conseillers, bien choisis, peuvent aider, même si vous restez maître à bord.
La « Flexigestion » , « gestion dynamique évolutive, rigoureuse et flexible de l’ensemble des systèmes de gestion d’un cabinet dentaire » est un outil intéressant. Mais avant de l’étudier, quelques rappels des définitions des mots « organisation », « ergonomie », « efficacité », « efficience », « processus », « check-list », « script » et « système » sont utiles. Pour définir le concept d’« approche préventive globale » (APG), il faut en plus rappeler ce qu’est la « prévention ».
De tous ces concepts, celui qui correspond le mieux à la « flexigestion » et à l’APG est celui des « systèmes » . Un système est une entité organisée ou complexe constituée de parties interdépendantes (cf Von Bertalanffy).
Le cabinet dentaire, méta-système ouvert (car interragissant avec l’environnement), est un système évoluant en permanence dans son environnement, proche ou lointain. Pour pouvoir évoluer, le professionnel s’appuie sur les individus, le temps, les finances, l’instrumentation et la formation/conseil.
Ce méta-système ouvert se divise en systèmes eux-mêmes structurés par des processus.
Un processus est un système organisé d’activités qui utilise des ressources pour transformer des éléments entrants en éléments sortants, le but étant de produire un produit ou un service. Le processus a un propriétaire, garant de son fonctionnement.
Les sept systèmes d’un cabinet dentaire sont l’organisation clinique et para-clinique, la gestion rationnelle des rendez-vous, une politique d’encaissement efficace, les premières consultations, la cohésion et la motivation de l’équipe, la gestion financière prévisionnelle, la communication interne et externe.
Les onze systèmes secondaires d’un cabinet sont le manuel du cabinet, le recrutement, la conception architecturale, le choix des équipements, le juridique, la stérilisation, l’informatique et les nouvelles technologies, l’approche clinique, le dossier patient, l’évaluation des honoraires et la gestion du stock.
La « flexigestion » est une gestion globale, rationnelle, documentée, mais souple d’un cabinet. La souplesse est importante : des procédures trop strictes sont une source de stress insupportable. Une structure trop rigide gêne le développement d’une entreprise. La gestion, bon guide mais mauvais maître, n’est qu’un outil au service d’un projet. La progression doit primer sur la perfection.
La « flexigestion » ne consiste pas à appliquer une recette, à se reposer sur un système unique ou une personne unique, mais à mettre en place des systèmes globaux, à s’appuyer sur les autres pour atteindre le maximum du potentiel du cabinet. L’adaptation est la clé de la survie (cf Darwin).
Partie II : Organiser les locaux et le matériel
3- La conception architecturale générale d’un cabinet dentaire
C’est fondamental. Il s’agit de concevoir un cabinet de façon ergonomique et rationnelle. L’ergonomie vise à réaliser une quantité de travail donnée avec moins de fatigue et d’effort. C’est autour de cela que doit se construire le cabinet, surtout la salle opératoire (SO). Les préférences du praticien et de son équipe ont aussi leur importance. L’aide d’un expert spécialisé est quasiment incontournable.
Les fondamentaux dans la planification d’un espace dentaire comprennent une phase 1 (il faut définir la vision générale du cabinet), une phase 2 (il faut décider où se trouveront le secrétariat, la salle de stérilisation et les SO, et éviter le sous-dimensionnement), une phase 3 (il faut estimer le nombre de personnes qui par jour fréquenteront le cabinet et décider de l’emplacement des salles annexes) et une phase 4 (il faut décider de la fonction de chaque salle et étudier le sens de circulation dans tout le cabinet). La détermination des zones fonctionnelles, ou « zoning », est fondamentale.
L’installation d’une SO double, qui fait gagner 40 à 60 minutes par jour pour dix patients reçus par jour, est à recommander.
On peut diviser le cabinet en deux zones : la zone clinique et para-clinique (elle-même divisée en une zone active et une zone semi-active) et la zone administrative, d’accueil et de repos (divisée en zone semi-active et zone passive).
La zone active est l’unité de production : SO, salle de stérilisation, salle de radio, chambre noire, laboratoire, local technique.
La zone semi-active est divisée en une zone semi-active paraclinique (bureau, pièce de stockage, salle de prévention et d’information) et en une zone semi-active (secrétariat ; celui-ci doit être placé au centre de la zone administrative et d’accueil).
La zone passive comprend la salle de réception et d’attente et la salle de repos du personnel.
Quatre métodes permettent de concevoir un cabinet dentaire.
La première est la méthode du diagramme des parcours répétés : c’est étude des trajets obligatoires.
La deuxième est la méhode des diagrammes de proximité et d’interrelation : il s’agit de placer les fonctions interdépendantes le plus près les unes des autres. La nécessité de la proximité est à évaluer sur une échelle allant de -1 (proximité indésirable) à 4 (proximité absolument nécessaire). La fréquence de déplacements entre chaque salle est à prendre en compte.
La troisième, recommandée pour des cabinets où cela pose problème, est la méthode de l’analyse de fréquence des parcours. Pendant une semaine ou un mois, chacun marque d’un trait la pièce de destination à chaque sortie d’une pièce.
La quatrième est la méthode des maquettes. Elle vise à meubler au mieux les pièces.
Il faut ensuite élaborer les circuits de distribution : les câbles électriques, l’hydro-sanitaire, l’air comprimé, l’aspiration chirurgicale de haute vélocité, le système de communication interne, le réseau informatique, la musique de fond, l’air conditionné, le gaz… Flexibilité et accesssibilité sont les maîtres mots.
L’esthétique est elle affaire de goûts.
Il faut enfin prendre en compte les nouveaux facteurs : la juridiciarisation, la communication, la prévention et l’information. Les locaux doivent être protégés contre le bruit, l’amiante. Il doit y avoir vestiaires et lavabos, et la salle de repas doit être différente de la salle de travail. Une salle spécialement dédiée au personnel est un plus. Depuis 2015, le cabinet doit, sous peine de fermeture, être accessible aux handicapés. La règlementation sur la radioprotection doit être assurée (déclaration tous les 5 ans auprès de la DSNR, maintenance annuelle). Des niveaux de doses maximales sont définis pour telle ou telle pièce, selon qu’elles sont en « zone contrôlée » ou en «zone surveillée». Les parois doivent être protégées contre les radiations ionisantes, des panonceaux et affiches doivent indiquer les zones contrôlées et les zones surveillées, les coordonnées des personnes compétentes ou du médecin du travail. En cas de non respect, on risque 6 mois à 1 an de prison, et 7500 à 15000€ d’amende.
Les limites à la liberté d’installation sont le respect des règles déontologiques (cf article R. 4127-203 du Code de la santé publique), les règles d’urbanisme, les éléments de jurisprudence.
Il faut égélement prêter attention à la salle de stérilisation, cœur de la zone clinique à proximité des SO : hygiène, communication (le patient doit la voir) et organisation rationnelle sont les priorités. Il faut éviter le sur-dimensionnement. L’entreposage des déchets d’activité de soins à risques infectieux y est obligatoire, le sol doit être en PVC thermo-soudé avec plinthes arrondies.
La technologie (radiologie numérisée en 3D, lasers etc.) est à prendre en compte en amont.Taille des pièces et des fauteuils augmentent. Il faut bien distinguer imagerie (radiologie ou vidéo) et informatique (administrative, visible par le patient).
4- Les Ă©quipements
Sont à choisir et à utiliser avec soin le fauteuil et l’unit. Par rapport au fauteuil, l’unit peut être placée à droite (schémas BK -Basis Concept- 1, avantageant l’approche clinico-décisionnelle), derrière (BK2, approche esthético-psychologique), devant et à gauche (BK3, approche technologico-ergonomique, sans doute la meilleure) ou dans la têtière (BK4, peu optimale). Le crachoir n’est pas indispensable.
Un compresseur spécifique à la pratique dentaire est à recommander. Bruyant, il doit être isolé. Sa capacité est à « surestimer » d’environ 25%. Un système d’aspiration haute vélocité (AHV) est indispensable. La pompe à salive classique est à proscire. L’aspiration à anneau liquide est à préférer à l’aspiration sèche avec pompe centrale.
Il faut également un équipement radio, un stérilisateur et un appareil de nettoyage aux ultrasons (pour stériliser des instruments préalablement nettoyés).
Un bon éclairage est indispensable, pour éviter fatigue visuelle et imprécision des mouvements. Il s’agit d’obtenir un bon éclairage intrabuccal, d’éviter l’éblouissement, d’optimiser le rendu des couleurs (pour la teinte des prothèses). Lumière naturelle et lumière artificielle doivent être maîtrisées. L’éclairage de la SO doit répondre aux normes ISO NF 9680 (pour la lampe opératoire) et EN NE12464-1 (pour l’ensemble éclairage général et opératoire). Tout doit partir de la cavité buccale, zone du champ opératoire, la zone E3 -la zone E1 étant la zone de circulation du travail et la zone E2 le fauteuil, les tablettes et le mobilier. Pour le praticien, les transitions entre E1 (500 lux en moyenne), E2 (1000 lux en moyenne) et E3 (entre 8000 et 20 000 lux en zone opératoire, pas plus de 1200 dans les yeux du patient), doivent être confortables.
En E3, les LED en blanc neutre (LOLé) sont à privilégier. En E2, le plafonnier est au-dessus du fauteuil. En E1, le luminaire d’éclairage général se trouve dans la longueur du fauteuil. Lampe opératoire et luminaire d’éclairage général doivent se compléter (exemple avec « I see » de « Degré K » qui combine LOLé et Albédo via une fonction travelling). Une bonne prise de teinte obéit à des règles.
Les nouvelles technologies peuvent être classées en 3 groupes ; les technologies de gestion et d’administration (prise de rendez-vous informatisée, gestion des encaissements, statistiques du cabinet, tenue du fichier patients, télétransmission, gestion des commandes/tableur et code-barres), les techniques de communication (caméra intra-buccale, logiciels de motivation, appareil photo numérique, site internet, enregistrement assisté par ordinateur) et les technologies cliniques et para- cliniques (comprenant 10 technologies à visée diagnostique et 16 technologies de traitement).
Les nouvelles technologies optimisent la gestion des rendez-vous et la gestion du temps, ainsi que la communication avec le patient. Elles contribuent aussi à la bonne image du cabinet (surtout la caméra endobuccale, la radiologie numérisée, le multimédia et internet). L’informatique concourt à la gestion financière et administrative du cabinet. Informatique et nouvelles technologies améliorent la qualité du service. Pour choisir quelle technologie adopter, il faut se poser, parfois avec l’aide de spécialistes, les bonnes questions.
De graves problèmes auditifs (à cause des turbines, détartreurs, aspirations et compresseurs) pouvant survenir, il faut bien choisir son matériel, bien choisir son emplacement, pratiquer des isolations et des corrections acoustiques, voire utiliser des protections auditives individuelles.
Au niveau de l’utilisation de la photo numérique (utile pour prendre des photos avant/après, des photos techniques, des photos pouvant servir de preuve juridique ou des photos pour le blanchiment- attention, technique délicate-, il faut s’équiper, en sachant que si la photo dentaire est une photo à caractère scientifique, il n’y a plus aucun produit spécifique pour le monde dentaire. Pour dialoguer avec le patient ou le prothésiste, un appareil compact suffit. Pour la chirurgie, investir dans un reflex entrée milieu ou haut de gamme.
5- L’organisation des plateaux de travail : les bacs et les cassettes
Il faut simplifier et rationnaliser. Dans la plupart des cas, pour pratiquer un acte, on se sert toujours les mĂŞmes instruments et produits.
Le système « cassettes et bacs » réduit la confusion, la fatigue visuelle, le stress. Il améliore vitesse, efficacité, qualité des traitements, sécurité, et détend l’ambiance de travail. Il s’agit de regrouper dans la cassette tous les instruments néessaires à un acte opératoire, et dans le bac, tout le consommable nécessaire au même acte. On ne perd plus de temps à chercher.
Il faut veiller à la planification (principe : ranger le contenu par ordre chronologique d’utilisation) , au choix des instruments (principe : éliminer les inutiles), à la standardisation (principe : il faut décider de toujours utiliser les instruments dans tel ordre et s’y tenir), à l’anticipation (l’assistante doit anticiper les demandes du praticien), à l’utilisation (l’instrument doit rester dans les mains du praticien jusqu’à ce qu’il ait fini de servir), à l’emplacement (il faut placer la cassette là où il est aisé de l’atteindre, le rangement devant se faire de préférence à 4 mains), à la disposition de la salle de soins.
Différents types de cassettes (une cassette étant un ensemble de deux plateaux –la base et le couvercle- perforés de nombreux évents qui s’emboîtent à l’aide d’une charnière) existent. Le système « tubs and trays » (bacs compartimentés regroupant tous les produits non stérilisables utilisés pour un acte donné et des plateaux pré-préparés) d’Harold Kilpatrick est à privilégier, car il permet une préparation simplifiée, une disponibilité immédiate et un remplacement rapide. Taille, capacité, dimensions, qualité des supports d’instruments, résistance à la corrosion, particularité des évents et des loquets de fermeture et pièces de rechanges sont à prendre en compte dans le choix. Quand la cassette idéale est créée, la prendre en photo et afficher la photo. Un code-couleur (une couleur pour chaque type d’acte) est utile. Les bagues couleur sont le système le plus utilisé.
Une cassette composite peut par exemple contenir une sonde, une précelle, un miroir, une spatule de bouche, un instrument pour fond de cavité, une spatule plastique, un fouloir pour matériaux, un instrument à sculpter et une canule d’aspiration. Un bac composite peut contenir une chaînette, un bloc à spatuler, un assortiment de crampons, des rouleaux de coton, un composite pour obturation plus teintier, une spatule de mélange, un etching, un bonding et des pinceaux, un vernis de cavité et de l’hydroxyde de calcium, des strips et des disques à polir, des coins de bois, du papier à articuler, des tenons dentinaires, une matrice et des porte-matrices, un jeu de fraises pour réparation de la cavité, une fraise micro-grain à finir.
Pour 2 patients par heure, il faut classiquement 3 à 4 cassettes d’examen (y compris urgences et prothèse totale), 3 d’amalgame, 3 de composite, 3 d’endodontie, 3 de prothèse, 2 de chirurgie, 3 de détartrage, 1 de chirurgie parodontale, 2 de dépose de fils de points de suture.
Dans une salle de stérilisation, un plan de travail comprend la poubelle, la cuve à ultrasons ou le thermo-désinfecteur, l’évier pour le rinçage, la zone d’égouttage ou de séchage automatique, le plan de travail pour l’emballage, l’autoclave, le rangement.
La stérilisation obéit à une règle fondamentale : il ne faut stériliser que des instruments propres. Toutes les étapes sont à respecter.
Problème financier et réticences de la part de l’assistante sont possibles, mais il ne faut pas perdre de vue l’essentiel : le gain de temps et la praticité.
6- La salle de stérilisation
La chaîne de stérilisation a pour objectif d’assurer la décontamination, le nettoyage, la stérilisation et le maintien de la stérilité des instruments jusqu’à leur utilisation. Ses étapes sont la pré-désinfection, le nettoyage, le rinçage et le séchage, le conditionnement, la stérilisation et le contrôle de la stérilisation. Conservation des instruments et traçabilité des dispositifs médicaux stérilisés sont aussi à prendre en compte.
Les objectifs sont l’hygiène, la communication et la rationnalité de la communication. En matière d’hygiène, les principes sont la marche en avant (toujours aller vers le plus propre), l’intégration rationnelle des appareils utilisés (éviter les déplacements inutiles), le non-surdimensionnement et l’automatisation. Les matériaux doivent être bien choisis. Qualité technique, esthétique et ergonomie participent à la bonne image du cabinet, surtout si la salle de stérilisation est vitrée.
Partie III : Gérer l’exercice clinique et para-clinique
7- Avant le traitement
Une clarification du cadre clinique diminue le stress du praticien. Pour procéder à cette clarification, il faut remplir un tableau à double entrée. Pour chaque exigence (dentisterie restauratrice, endodontie, parodontologie, chirurgie, implantologie, prothèse fixée, prothèse amovible, orthodontie, occlusodontologie, pédodontie), il faut définir ce que l’on maîtrise, ce que l’on souhaite améliorer ou introduire, son offre thérapeutique officielle (OTO) future, et la date limite. Tout repose sur une philosophie générale qui met le patient au centre, et le principe d’une dentisterie globale (s’opposant à une dentisterie dent par dent). Il faut faire cliniquement de son mieux avant de penser à son gain personnel et pour cela, ne pas accepter trop de patients.
La première consultation doit comprendre anamnèse, examen objectif, diagnostic et pronostic.
L’anamnèse comprend un historique médical écrit (à remplir par le patient avant l’entretien) et un entretien pré-clinique (où praticien et patient entrent en connexion). L’examen clinique doit déterminer si le patient constitue un cas simple, complexe ou très complexe. Inspection, palpation, auscultation (adaptées à la pratique dentaire) sont les quatre étapes classiques. Prise d’empreintes, radiographies et photographies constituent un complément. Pré-diagnostic et pronostic sont établis au cours d’un examen clinique primaire durant une demi-heure, conduit hémi-arcade par hémi- arcade puis dent par dent. Durant cette étape, les honoraires sont demandés au patient. L’examen clinique de complément est constitué de prise d’empreintes pour modèles d’étude, de cires d’enregistrement de l’occlusion, de radiographies (endo-buccales et/ou panoramiques) et de photographies. Il faut ensuite classer et ranger ces examens de complément.
Examen approfondi et diagnostic sont réalisés lors d’une deuxième séance, éventuellement couplable avec la troisième, selon la complexité du cas. Il s’agit de vérifier et d’approfondir les hypothèses émises lors de l’examen clinique primaire, d’enregistrer l’occlusion en vue d’une analyse et d’effectuer un sondage parodontal et d’informer le patient.
L’exposé au patient du diagnostic définitif, du plan de traitement, du pronostic et du devis écrit sont réalisés à la troisième séance.
Au niveau du plan d’hygiène, la partie 1 comprend l’historique médical et l’anamnèse (le patient doit répondre à un questionnaire écrit et le praticien doit compléter les informations par oral), les bains de bouche, la digue, les vaccinations (le vaccin du personnel contre l’hépatite B est indispensable), l’antiseptie des mains, les gants jetables (préférer le latex), le masque, les lunettes (préférer les lunettes à coque), les tenues professionnelles (différentes des tenues de ville) et la gestion des déchets (règlementations rigoureuses à respecter). La partie 2 comprend les turbines et les contre-angles (maillons faibles de la chaîne d’aseptie), le nettoyage aux ultrasons (où des micro-bulles de cavitation arrachent par succion les débris des instruments), le conditionnement en sachet (pour les sachets thermo-soudés, la soudure doit être de 8mm minimum), les stérilisateurs, les désinfectants, les surfaces (par désinfection ou barrières de protection à usage unique), les équipements (pour chacun –fauteuil, unit, crachoir, aspiration-, des points sont à contrôler), le traitement de l’eau (désinfection permanente, après chaque patient ou poussée en fin de journée), le traitement de l’air (attention à la légionellose), la conception architecturale des locaux.
La tenue d’un manuel de cabinet est à recommander, par exemple le programme « Gestion globale de cabinet», reprenant les six systèmes organisationnels (gestion des rendez-vous, politique d’encaissement, pilotage du cabinet, gestion des plans de traitement, cohésion d’équipe et qualité du service en dentisterie. La règle est d’écrire ce que l’on fait. Check-lists (correspondant à des protocoles de travail pour les tâches techniques) et règles (régissant le fonctionnement du cabinet), scripts (scénarios préétablis en réponse aux situation de communications les plus fréquentes) et bases documentaires (listes des documents-types) sont utiles, à condition d’être mis à jour. Un manuel du cabinet (avec copie numérique) doit tout référencer.
Le « temps improductif investi » consiste à réserver un temps de travail pour le praticien et son équipe, sans patient. Tous les jours, une réunion quotidienne(10/15 minutes animées par l’assistante) est nécessaire.
8- Pendant le traitement : le travail Ă quatre mains
Le praticien et l’assistante doivent interagir souplement. L’assistante doit maintenir un champ opératoire clair et transférer efficacement les instruments et matériaux selon les besoins du praticien. Le cadran de la zone « horaire » (cercle au-dessus du fauteuil avec visage du patient au centre, le crâne à 12h) comprend la zone de l’opérateur (de 7 à 12h pour un praticien droitier), la zone de transfert (de 4 à 7h), la zone de l’assistante (de 2 à 4h) et la zone statique (de 12 à 2h).
Le praticien doit maintenir une vision directe (le praticien regarde directement dans la bouche du patient) et indirecte (via un miroir), claires.
L’aspiration chirurgicale à haut débit (AHD) libère le fond de la bouche de la salive, du sang, de l’eau et des débris, rétracte la langue et la joue, réduit l’aérosol bactérien provoqué par les instruments dynamiques à grande vitesse. L’embout doit être bien choisi, bien positionné et bien utilisé. Le rinçage de la cavité buccale maintient un champ opératoire clair.
Le transfert d’instruments et de matériaux est optimisé par une bonne prise en main (les trois prises de base étant la prise-stylo, la prise-paume et la prise paume-pouce). Ses principes de base sont la bonne chronologie de la séquence opératoire par l’assistante, des mouvements réduits au minimum, des présentations pratiques (extrémités fonctionnelles de l’instrument orientées vers le bas pour les secteurs manibulaires et vers le haut pour les maxillaires). Le praticien ne doit pas lever les yeux du champ opératoire.
Habituellement, la main gauche de l’assistante transfère les instruments (l’annulaire et l’auriculaire collectent les instruments utilisés, les autres placent le nouvel instrument dans la main du chirurgien), sa main droite contrôle l’aspiration chirurgicale. Mais le transfert à deux mains (transfert de prise de paume, de pièce à main, de la seringue air-eau, de précelle porte-coton, de ciseaux, de miroir et de sonde) est plus simple. Les problèmes les plus fréquents sont l’encombrement (quand l’instrument est présenté trop tôt), le court-circuit (quand il se présente trop loin), le croisement des instruments pendant le transfert et la désorientation. La présentation des matériaux dentaires (ciments et fonds de cavité, matériaux d’empreinte et composites, amalgames) doivent être présentés dans les règles.
9- Après le traitement
Il s’agit d’éviter les pertes de temps pendant les changements de patient. Deux schémas sont possibles, selon qu’il y a un fauteuil, un praticien et une assistante, ou deux fauteuils, un praticien, une assistante et une secrétaire.
Le recyclage sécurisé de l’instrumentation et la stérilisation constituent l’étape suivante. Le Code de déontologie de la profession et le Code de santé publique régissent la question des dispositifs médicaux (DM). Ceux-ci peuvent être à usage unique ou réutilisables, critiques (exemple : la fraise, qui doit être stérilisée et conditonnée), semi-critiques (exemple : la canule d’aspiration, qui doit être seulement stérilisée) ou non critiques (exemple : le fauteuil, qui doit simplement être désinfecté).
Le concept « MTIO » (Méthode de traitement instrumental optimisé) s’appuie sur une logique de marche en avant circulaire, un matériel adapté et compatible et une formation spécifique.
Du côté des instruments, on note six étapes : l’utilisation, le transfert 1 (septique), la stérilisation, le stockage, le transfert 2 (stérile) et la mise en place/préparation. Chacune de ces six étapes se divise en deux : risque élevé et risque réduit. Premièrement, on pré-désinfecte et nettoie aux ultra-sons et au thermodésinfecteur. Puis on rince dans l’évier. On sèche ensuite grâce à la cuve de séchage et au plan de travail. On conditionne avec la thermo-soudeuse, on stérilise avec les stérilisateurs, et on conserve dans les placards et armoires.
Il ne faut pas confondre désinfection et stérilisation. Les expressions «stérilisation à froid», « désinfection totale » (seule la stérilisation élimine totalement les germes) et « désinfection terminale » (impropre aux instruments) sont à proscrire.
Voici les définitions correctes :
La décontamination est une opération visant à diminuer la population bactérienne afin d’éviter toute contamination et/ou infection croisée ultérieure. On obtient une réduction entre 102 et 104.
La désinfection est une opération au résultat momentané permettant de tuer les microbes et/ou d’activer les virus indésirables. Le résultat est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération.
L’antiseptie est la mise en œuvre des moyens physiques ou chimiques de lutte contre l’infection par la destruction systématique des germes pathogènes.
La stérilisation est la destruction de tous les microbes dans un système par l’action d’agents antimicrobiens et élimination de tous les corps microbiens.
« Bactéricide » est un qualificatif concernant toute substance ou tout procédé ayant la propriété de tuer les bactéries dans des conditions définies.
« Fongicide » (anciennement « antifongique ») est un qualificatif concernant toute substance ou tout procédé ayant la propriété de tuer les champignons dans des conditions définies.
« Sporicide » est un qualificatif concernant toute substance ou tout procédé ayant la propriété de tuer les spores bactériennes dans des conditions définies.
« Virucicide » est un qualificatif concernant toute substance ou tout procédé ayant la propriété d’inactiver les virus dans des conditions définies.
Il faut choisir son désinfectant avec soin, et pour cela avoir une idée claire des objectifs à atteindre (désinfection de bas niveau, de niveau intermédiaire et de haut niveau), vérifier la conformité aux normes du désinfectant (entre 1981 et 1998, il en a été édité 20), respecter les recommandations du fabricant et comparer les prix de revient.
Au niveau de la stérilisation, plusieurs méthodes existent : la vapeur d’eau, la chaleur sèche, l’oxyde d’éthylène (avec désorption) et le gaz-plasma. Deux types de stérilisateurs à la vapeur d’eau existent : les petits (moins de 60 litres, les plus utilisés en dentisterie et référencés par la norme NF EN 554) et les grands (plus de 60 litres). Les différentes étapes de l’utilisation d’un stérilisateur à vapeur sont le conditionnement des dispositifs médicaux, la préparation de la charge (avec l’indicateur de passage et l’indicateur physico-chimique classe 6 ISO 11140-1, anciennement « intégrateur »), puis le chargement, le lancement et le déchargement du stérilisateur. Au début de chaque journée d’utilisation, il faut effectuer un essai de pénétration de la vapeur (test de charge poreuse ou essai de Bowie-Dick). Il faut ensuite effectuer une traçabilité, et pour cela réunir l’ensemble des contrôles, et accompagner ces contrôles des renseignements suivants sur un cahier ou dans une pochette. Il faut enfin stocker le matériel.
Au niveau de la gestion des déchets (régie par une loi, un décret et deux arrêtés d’application), il faut distinguer les déchets d’activités de soins non contaminés, assimilables aux ordures ménagères, et des déchets d’activités de soins à risque, eux-mêmes divisés en déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI) et déchets à risques spécifiques.
Les DASRI doivent être conditionnés en emballages spécifiques (selon qu’ils sont mous ou tranchants), stockés –lorsque leur quantité est supérieure à 5kg/mois- dans un local spécifique (avant enlèvement –dans des conditionnements adaptés- et incinération). Les amalgames doivent être séparés par les chirurgiens dentistes, les films radiologiques et résidus argentiques collectés et traités par des sociétés spécialisées). Les déchets (coupants ou tranchants, DASRI, d’amalgames et ménagers) doivent en fait être triés dès leur production. Quatre conteneurs sont nécessaires, pour chaque type de déchets.
En conclusion générale, insistons à nouveau sur le fait que les cabinets doivent être gérés par une combinaison de rigueur et de souplesse, laquelle diminue le stress.