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(Article basé sur l’ouvrage Rework, réussir autrement par Jason Fried et David Heinemeier Hansson)

Les mĂ©thodes et systèmes de gestion d’entreprise tentant de rĂ©pondre aux dĂ©fis modernes, tant commerciaux qu’entrepreneuriaux, sont nombreux, et l’on peut parfois se sentir submergĂ© par la variĂ©tĂ© d’approches possibles, mĂŞme si nombre de conseils semblent constants. Lean, six sigma, service client cinq Ă©toiles ou encore branding, la plupart rĂ©clament un investissement personnel et matĂ©riel important et surtout, un apprentissage long et parfois fastidieux, pour soi comme pour les membres de son Ă©quipe. C’est pourtant en prenant le contre-pied total de la plupart des idĂ©es consensuelles sur les exigences du management, du marketing et des relations que Jason Fried et David Heinemeier Hansson ont assurĂ© la pĂ©rennitĂ© improbable de leur start-up de software 37signals durant vingt ans : « Nos dĂ©tracteurs ne comprennent pas qu’une entreprise puisse rejeter croissance, rĂ©unions, budgets, conseils d’administration, publicitĂ©, reprĂ©sentants de commerce et « dure rĂ©alitĂ© Â», et prospĂ©rer quand mĂŞme. C’est leur problème, pas le nĂ´tre. […] Ils disent qu’on ne peut pas jouer dans la cour des grands sans un Ă©norme budget de publicitĂ© et de marketing, ni rĂ©ussir en fabriquant des produits qui font moins que ceux des concurrents, ni tout inventer au fur et Ă  mesure. C’est pourtant ce que nous avons fait. Ils disent bien des choses. Nous attestons qu’ils se trompent. Â»

Dans l’ouvrage qui nous intĂ©resse aujourd’hui, le seul consensus pourrait finalement tenir Ă  l’état d’esprit de la rĂ©ussite : y croire et la vouloir est l’exigence primordiale, et si les techniques commerciales et mĂ©thodes managĂ©riales Ă  la mode vous semblent trop compliquĂ©es ou gourmandes en temps, en moyens et en Ă©nergie, il est possible de rĂ©ussir autrement, voire en faisant le contraire de ce qui est gĂ©nĂ©ralement prĂ©sentĂ© comme incontournable, en dix Ă©tapes iconoclastes voire parfois insolentes, qui s’adressent aussi bien aux crĂ©ateurs qu’aux chefs d’entreprise Ă©tablis, quelles que soient la taille et la vocation de la sociĂ©tĂ©.

Le déboulonnage

Ignorez la « dure rĂ©alitĂ© Â»

Les obsĂ©dĂ©s du rĂ©alisme sont en rĂ©alitĂ© des pessimistes. Dans la « dure rĂ©alitĂ© Â», 37signals n’aurait pas dĂ» pouvoir attirer des millions de clients et crĂ©er des filiales sur deux continents sans publicitĂ© ni service commercial. La « dure rĂ©alitĂ© Â» est une excuse pour ne pas essayer.

Apprendre de ses erreurs : une idĂ©e surfaite

L’échec n’est pas un prĂ©alable au succès. On n’apprend de ses erreurs uniquement ce qu’il ne faut pas ou plus faire, ce qui a bien moins d’intĂ©rĂŞt que ce qu’on tire du succès : plus de succès. Évitez l’échec et ne le minimisez pas en pseudo-philosophie.

Laissez la planification Ă  long terme aux devins !

La planification à long terme chère aux donneurs de leçons relève la plupart du temps du fantasme. Vous devez pouvoir réagir, improviser, saisir les occasions, ce qu’un plan trop détaillé empêche généralement de faire. Agissez, plutôt que d’imaginer.

Pourquoi grossir ?

Les petites entreprises veulent grossir, les grandes rĂŞvent de plus de flexibilitĂ©. Plus grand, c’est plus de personnel, de responsabilitĂ©, de dĂ©penses, d’infrastructure, de travail : plus l’entreprise est complexe, plus elle est difficile et stressante Ă  gĂ©rer. Laissez votre luciditĂ© et vos capacitĂ©s rĂ©elles dĂ©cider de votre taille, pas votre ego.

Dehors, les bourreaux de travail !

La culture occidentale aime la figure du bourreau de travail, qui planche jusqu’à l’aube et culpabilise les collaborateurs par sa seule prĂ©sence, souvent pourtant exagĂ©rĂ©e voire contreproductive. Outre que ce rythme n’est pas viable et finira par engendrer l’épuisement, il masque souvent une insuffisance d’efficacitĂ©. Pendant ce temps le vrai « hĂ©ros Â» est chez lui, non parce qu’il travaille moins mais parce qu’il a trouvĂ© une manière plus rapide de faire les choses.

Le démarrage

Distinguez-vous

Pour rĂ©ussir, deux impĂ©ratifs : le sens (ce que vous faites est important) et l’urgence (vous n’avez pas l’éternitĂ© devant vous pour bien faire). Ne vous convainquez pas que d’immenses moyens ou Ă©quipes sont nĂ©cessaires Ă  faire la diffĂ©rence : pensez Ă  Matt Drudge, dont le Drudge Report, une simple page Web tenue Ă  l’origine par un homme seul, a rĂ©volutionnĂ© le monde de l’information et des mĂ©dias amĂ©ricains. Une seule bonne idĂ©e peut changer le monde dans votre secteur aussi.

RĂ©pondez Ă  vos propres besoins

James Dyson invente le premier aspirateur cyclonique sans sac suite Ă  un Ă©nième bouchage des filtres du sien. L’entraĂ®neur Bill Bowerman fait fondre du caoutchouc dans le gaufrier familial pour amĂ©liorer les souliers de course de son Ă©quipe d’athlĂ©tisme : la semelle gaufrĂ©e de Nike est nĂ©e. Travaillez sur des produits ou services qui vous manquent, que vous souhaiteriez utiliser vous-mĂŞme. C’est le meilleur gage de maintien de la passion et de connaissance du problème.

Passez à l’action

Les idĂ©es ne valent rien. C’est ce qu’on en fait qui compte. « J’ai eu l’idĂ©e d’eBay avant la crĂ©ation d’eBay, SI J’AVAIS agi Â» … si j’avais agi je serais milliardaire, mais tel n’est pas le cas. Les idĂ©es courent les rues. C’est l’exĂ©cution qui fait la diffĂ©rence.

Pas le temps ? Mauvaise excuse !

On a toujours le temps si on l’utilise correctement. Il ne s’agit pas de travailler 16 heures par jour, mais de prendre une heure de-ci de-lĂ  sur la tĂ©lĂ©vision, le repas, les distractions chronophages pour faire avancer les choses. C’est un bon moyen de voir si l’enthousiasme se maintient ou si « l’idĂ©e Â» n’était que ça : une idĂ©e.

Prenez position

Affirmez-vous et cessez de tenter de faire l’unanimitĂ©. Certes les opinions tranchĂ©es et attitudes dĂ©cidĂ©es se paient : mais si vous y perdez les mĂ©contents, vous fidĂ©lisez dĂ©finitivement les adhĂ©rents. Avec une position claire, les dĂ©cisions s’imposent d’elles-mĂŞmes : non, 37signals n’ajoutera pas, par exemple, les fonctionnalitĂ©s proposĂ©es par ses concurrents Ă  ses logiciels pour Ă©largir sa clientèle, car leur objectif (et leur besoin personnel) Ă©tait la simplicitĂ©. Au contraire ils proposeront des versions toujours plus Ă©purĂ©es.

Si vous le dites, faites-le !

Prendre position, ce n’est pas seulement dire ou afficher un « Ă©noncĂ© de mission Â», c’est le vivre. Ne dites pas dans un message d’attente tĂ©lĂ©phonique « votre appel est important pour nous Â», prouvez-le en Ă©vitant l’attente Ă  vos appelants. N’affichez pas un engagement de « service exceptionnel Â» dans votre salle d’attente si elle est sale et froide et votre rĂ©ceptionniste dĂ©sagrĂ©able.

Le financement externe : un plan Z plutĂ´t qu’un plan B

Évitez au maximum le recours Ă  des fonds externes, pour trois raisons :

1/ Vous renoncez à être le seul maître à bord et devrez rendre des comptes à vos investisseurs, qui deviennent décisionnaires

2/ Encaisser devient plus important que bâtir une société saine et durable ou satisfaire vos patients, les investisseurs voulant toujours récupérer leur mise dans un temps limité

3/ Dépenser l’argent d’autrui crée une dépendance à la facilité et la recherche de fonds distrait de l’essentiel

Il vous faut moins que vous ne le pensez

Vous faut-il dix employĂ©s ou pouvez-vous gĂ©rer avec deux pour l’instant ? Vous faut-il vraiment ces 50 000 euros de matĂ©riel ou 5000 euros suffiraient-il ? Avez-vous besoin d’autant d’espace ou un local plus petit conviendrait-il ? Analysez honnĂŞtement vos besoins et capacitĂ©s et non vos envies et ambitions.

Bâtir pour vendre, c’est bâtir pour échouer

Ayez une stratégie d’engagement, pas de retrait. Ne travaillez pas en visant la vente future de votre affaire, mais son succès actuel et votre épanouissement à sa tête.

Évitez de vous alourdir

Contrats et plans à long terme, stocks, décisions définitives, processus figés sont autant de poids alourdissant une entreprise. Pesez chaque ajout, chaque engagement, chaque complication dans votre fonctionnement en fonction de la possibilité ou pas d’en changer ou de l’abandonner si nécessaire.

La progression

BĂ©nissez vos contraintes

Moins, c’est mieux. DĂ©veloppez votre crĂ©ativitĂ© avec ce dont vous disposez (temps, moyens) plutĂ´t que de dĂ©finir des plans nĂ©cessitant « plus Â» pour ĂŞtre appliquĂ©s.

RĂ©duisez vos ambitions

Une moitiĂ© exceptionnelle vaut mieux qu’un tout mĂ©diocre : rĂ©duisez vos ambitions de moitiĂ©, Ă©laguez vos objectifs pour ne garder que l’essentiel et prĂ©fĂ©rez faire une chose parfaitement que dix juste correctes.

Commencez au cœur de l’entreprise

Focalisez-vous toujours sur le cœur de votre entreprise, c’est-à-dire ce sans quoi elle n’existe pas. Un restaurant de sushis existe sans wasabi, sets de table ou publicité, pas sans sushis ni cuisinier. Un cabinet dentaire existe sans marketing ni personnel commercial ou relationnel, pas sans un bon dentiste et du matériel décent. Ne perdez pas vos priorités de vue.

Les détails peuvent attendre

Un architecte ne se préoccupe pas de la marque du lave-vaisselle avant d’avoir le plan de la maison. On n’accroche pas les tableaux au mur si le mur n’est pas peint. C’est la même chose dans la progression d’une entreprise. Les détails sont fignolés quand le reste est achevé et solide.

Prendre des décisions fait avancer

Comme pour tout, les dĂ©cisions reportĂ©es s’empilent et ce qui s’empile finit bâclĂ©, oubliĂ© ou jetĂ©. Tranchez, osez, n’attendez pas le moment idĂ©al ou la solution parfaite : ils n’existent pas. Agissez, puis ajustez, en permanence.

Procédez comme un conservateur de musée

Ce qui diffĂ©rencie un musĂ©e d’un entrepĂ´t, c’est ce qui n’y est pas : sĂ©lectionnez, Ă©purez, Ă©laguez, ne gardez que le meilleur (des idĂ©es, des produits, des collaborateurs, des services…). On l’a dit, moins, c’est mieux : on peut toujours ajouter, acquĂ©rir, mais plus difficilement Ă©liminer ce qui est en place.

Ça va mal ? Faites-en moins !

En effet, quand quelque chose ne va pas, on a tendance Ă  « rajouter Â» : du budget, du personnel, des services, alors qu’élaguer et se concentrer sur ce que l’on fait bien, sur ce qui fonctionne est souvent la solution.

Concentrez-vous sur ce qui ne changera pas

Souvenez-vous que les modes passent. Sans les ignorer, ne misez pas tout sur des tendances passagères mais sur ce que votre public voudra encore dans dix ans.

C’est le contenu qui compte

Donnez un mauvais club Ă  Tiger Woods, il vous Ă©crasera quand mĂŞme. Donnez une guitare minable Ă  Van Halen, vous reconnaĂ®trez sa patte quand vous ne serez jamais Ă  son niveau avec les meilleurs instruments et amplificateurs : l’outil ne remplace pas l’aptitude, ni l’équipement la paresse ou le manque de compĂ©tences.

Vendez vos sous-produits

Comme Henri Ford devenant numĂ©ro 1 du charbon de bois en transformant les chutes de la Ford T en briquettes Ă  brĂ»ler, analysez les « chutes Â» parfois inattendues de votre activitĂ© et tirez-en profit.

Lancez-vous !

En s’imposant des échéances, on gagne en lucidité et en rapidité. Sans lésiner sur la qualité, n’attendez pas une perfection qui n’arrivera jamais pour vous lancer, mais découvrez et ajustez au fur et à mesure.

La productivité

Fuyez les faux consensus

Soyez concret et rĂ©duisez les couches d’abstraction. Fuyez la paperasse et les rapports que personne ne lit. Lorsque 100 personnes lisent la description d’un individu, chacun s’en fait une idĂ©e diffĂ©rente. Lorsqu’elles le voient, chacun voit la mĂŞme chose : montrez au lieu d’expliquer.

Travaillez-vous pour rien ?

Demandez-vous toujours pourquoi vous faites ce que vous ĂŞtes en train de faire : est-ce utile ? Ou est-ce seulement agrĂ©able ou facile, sans ajouter de valeur Ă  votre journĂ©e ? Y a-t-il autre chose de plus simple et/ou plus utile Ă  faire ?

Les interruptions minent la productivité

Toute interruption force à recommencer de zéro, ne serait-ce que mentalement. Instaurez l’interruption minimale par le téléphone ou les irruptions, proscrivez les journées fragmentées par des réunions, pauses injustifiées, entretiens et ménagez de longues plages dédiées à une même tâche afin de la mener à bien. Ne commencez rien que vous ne pouvez finir en une fois.

Les réunions sont toxiques

Les rĂ©unions sont particulièrement contreproductives, parce qu’elles portent gĂ©nĂ©ralement sur des mots et concepts et non sur du concret, et mobilisent un temps qui pourrait ĂŞtre consacrĂ© Ă  ce concret. Dix personnes en rĂ©union durant une heure, ce sont dix heures de production concrète perdues. Si elle s’avère indispensable, dĂ©finissez le temps rĂ©el nĂ©cessaire (parfois, sept minutes suffisent, pourquoi en programmer trente ?) et allez Ă  l’essentiel.

Visez l’efficacité plutôt que l’excellence

Le mieux est l’ennemi du bien. Si vous cherchez une vue panoramique, vous pouvez bien sĂ»r escalader l’Everest, mais prendre l’ascenseur jusqu’au sommet du gratte-ciel voisin remplit aussi bien l’objectif. Pensez en judoka : un maximum d’efficacitĂ© pour un minimum d’effort, plutĂ´t que de gaspiller des ressources ou pire, de ne rien faire parce que vous ne pouvez pas vous offrir la solution complexe envisagĂ©e.

Alimentez la flamme

L’élan vous garde en mouvement, si vous n’aimez pas ce que vous faites, il y a peu de chances que le fassiez bien. Fixez-vous de petits objectifs et accordez-vous de petits succès faciles et réguliers, afin d’entretenir votre entrain et votre motivation.

Ne jouez pas au héros

Vous avez commencĂ© une tâche dont vous estimiez la durĂ©e Ă  deux heures, au bout de quatre vous ĂŞtes toujours loin d’avoir terminĂ©. DĂ©lĂ©guez ou laissez tomber ! Se convaincre qu’il faut aller au bout Ă  tout prix ou que vous seul pouvez l’achever est le meilleur moyen de s’obstiner dans ce qui est probablement une erreur, quatre heures perdues vaudront mieux que les six, huit, dix heures que vous allez encore y passer sans plus de succès.

Au lit !

Vous priver de sommeil pour abattre plus de travail est une mauvaise idĂ©e. Les quelques heures gagnĂ©es seront rapidement minĂ©es par les effets de la fatigue : irritabilitĂ©, perte d’entrain, de rĂ©activitĂ©, de concentration… Rengainez la fiertĂ© masochiste de vous dire Ă©puisĂ© et mĂ©nagez-vous.

Fractionnez vos grands projets

Personne ne peut réellement tout prévoir et estimer le temps qu’il faudra à atteindre les grands objectifs. Une simple course à l’épicerie de censément dix minutes peut tourner à l’heure suivant la fréquentation ou les rencontres en route, comme un rendez-vous de deux heures peut finalement être achevé en quinze minutes et vous laisser un temps libre imprévu. Divisez plutôt vos grands projets en tâches et sous-tâches et en sous-objectifs à courte échéance, et réagissez en fonction de la réalité, pas de vos plans.

Les listes interminables… ne sont jamais terminĂ©es

Rien n’est plus culpabilisateur qu’une longue liste de tâches « urgentes Â» non acquittĂ©e. PlutĂ´t que de faire une liste de quarante tâches, prĂ©fĂ©rez en faire quatre de dix, ainsi chaque fois que vous en cocherez une ce sera 10% de la liste qui seront achevĂ©s. Le travail sera le mĂŞme, mais vous en tirerez plus de satisfaction et de motivation.

Prenez de petites décisions

PrĂ©fĂ©rez les dĂ©cisions mineures aux grands engagements qui sont difficiles Ă  prendre mais aussi difficiles Ă  renier ou Ă  modifier une fois pris. Plus on met d’énergie Ă  aller dans une direction, plus il est difficile de changer de cap. L’Everest s’escalade un rocher Ă  la fois, dĂ©cidez du prochain rocher et pas du chemin complet, l’objectif, au sommet, restera le mĂŞme !

Les concurrents

Évitez les pâles copies

Le processus de crĂ©ation, en art comme en entreprise, est indispensable. La copie fait l’économie de la rĂ©flexion, et le copieur est dĂ©jĂ  en retard sur son temps, puisqu’il refait ce qui a Ă©tĂ© fait, et forcĂ©ment moins bien. Laissez-vous influencer et inspirer, perfectionnez vos techniques en vous fondant sur l’existant, mais ne vous contentez pas de reproduire, innovez !

Personnalisez votre service

N’essayez pas de crĂ©er un service passe-partout mais mettez-y suffisamment de vous-mĂŞme pour que d’une part, ce soit vous que l’on ait envie de copier et d’autre part, que les copies ne puissent jamais ĂŞtre tout-Ă -fait ce que vous proposez. DĂ©finissez ce qui vous rend unique et faites-en votre empreinte !

Cherchez la bagarre

S’assumer et mĂŞme se dĂ©signer un « ennemi Â» implique l’affect et engage Ă  prendre parti. Coca et Pepsi, Apple et Microsoft, ou encore Dunkin Donuts et Starbucks l’ont bien compris. Prendre position (contre les cliniques du sourire ou les implants Ă  l’étranger par exemple) vous fait sortir du lot et fidĂ©lise le patient en le rendant fan plutĂ´t que consommateur.

Faites-en moins qu’eux !

Sortez de la mentalitĂ© « course aux armements Â» qui pousse Ă  toujours « faire pareil +1 Â», cycle sans fin, et prĂ©fĂ©rez faire moins, mais mieux, que ce que propose votre concurrent. SpĂ©cialisez-vous sur un ou deux points oĂą vous excellez et prĂ©fĂ©rez la qualitĂ© Ă  la quantitĂ© de services proposĂ©s.

Ă€ quoi bon se soucier de vos concurrents ?

Finalement, le paysage concurrentiel change sans arrĂŞt et vous prĂ©occuper de trop de vos concurrents peut vite tourner Ă  l’obsession, et saper votre motivation, votre confiance ou votre crĂ©ativitĂ©. Vouloir ĂŞtre « le nouveau Untel Â» est dĂ©jĂ  un Ă©chec. Soyez unique. Soyez vous-mĂŞme.

L’évolution

Habituez-vous Ă  dire non

Si vous êtes cuisinier, mieux saler vos plats si les clients se plaignent est une chose, mais ajouter des bananes à vos lasagnes parce que deux ou trois l’ont suggéré est idiot. Vous seul savez ce qui est bon pour votre entreprise, sachez dire non et renoncer aux pinailleurs (patients comme collaborateurs).

Laissez vos patients ĂŞtre infidèles !

Vouloir satisfaire à tout prix les exigences de vos patients fidèles peut vous entraîner à bâtir une activité qui ne sera plus adaptée à d’autres, et trop attacher votre succès à leur fréquentation, vous rendant dépendant d’eux. En restant simple et basique, vous offrez un service dont de nouveaux patients auront toujours besoin, pas une pratique sur-mesure qui ne sera plus adaptée si vous perdez ces patients.

Laissez mûrir vos bonnes idées

S’il est important d’agir plutĂ´t que de pondĂ©rer sans cesse, il faut tout de mĂŞme Ă©viter de foncer tĂŞte baissĂ©e dans chaque « nouvelle idĂ©e gĂ©niale Â». Si elle vous paraĂ®t tout juste intĂ©ressante le lendemain, prenez le temps de la soupeser un peu plus avant de mettre le reste de cĂ´tĂ© pour vous y consacrer.

CrĂ©ez du « bon Ă  la maison Â»

Fuyez le clinquant et la surenchère comme ces gadgets qui semblent formidables en magasin mais finalement ne sont plus si pratiques ou utiles une fois à la maison. Une bonne publicité ou un bon marketing ne rachète pas une mauvaise expérience, focalisez-vous sur la qualité réelle et la fiabilité à long terme de vos soins plutôt que sur leur attractivité.

ArrĂŞtez de prendre des notes

Les suggestions ou demandes qui doivent ĂŞtre notĂ©es sont sans intĂ©rĂŞt : si vous les oubliez, c’est qu’elles n’étaient pas si importantes. Si elles reviennent, vous y reviendrez Ă©galement.

La publicité et le marketing

Profitez de l’obscurité

La popularité crée une exigence de cohérence et de prévisibilité. Profitez de votre relative discrétion pour tester vos idées sans conséquences trop sérieuses sur votre réputation.

Bâtissez-vous une audience

Plutôt que dépenser des fortunes pour obtenir des prospects, visez l’acquisition d’une audience qui sera attentive puisque conquise, en élargissant votre message (blog, vidéos, forums) sur autre chose que votre entreprise.

Enseignez

La pédagogie et le partage du savoir attireront toujours plus d’intérêt que la publicité pure, et sont idéaux pour la réputation et la création d’un lien avec votre audience.

Faites comme les cuisiniers réputés

Les grands cuisiniers ne conservent pas jalousement leurs secrets mais partagent leurs recettes dans des livres, Ă©missions, ateliers… faites comme eux, partagez votre savoir et votre succès sans compter !

Amenez les gens en coulisses

Permettez à vos patients et prospects de connaître les coulisses de votre activité, offrez-leur une fenêtre sur le fonctionnement et les arcanes de votre cabinet, afin de renforcer le lien et la confiance en créant une forme d’intimité.

Personne n’aime les fleurs en plastique

On leur préfère les fleurs naturelles, toutes différentes et uniques, même si elles fanent. Montrez-vous tel que vous êtes, avec vos qualités et vos défauts et non tel que vous pensez devoir être. Épurez, conservez l’essentiel, mais n’aseptisez pas, n’édulcorez pas votre personnalité et vos valeurs.

Oubliez Le Monde et le Wall Street Journal

Préférez les médias de niche ou locaux, réellement efficaces au niveau de la fréquentation et de l’intérêt, aux médias de masse, qui ne boostent que l’ego. Évitez également les communiqués de presse, qui n’intéressent personne sauf à déjà être une pointure.

Ce sont les dealers qui ont tout compris

Si l’on est sĂ»r que son produit (ou service) est bon, on n’hĂ©site pas Ă  en sacrifier une infime partie en Ă©chantillon gratuit pour que le client le teste et revienne cette fois en payant. Ce n’est du « gaspillage Â» que si le rĂ©sultat n’est pas Ă  la hauteur ; et si les bĂ©nĂ©ficiaires ne reviennent pas, c’est la qualitĂ© du produit qui est en cause, pas la dĂ©marche du don.

Le marketing n’est pas un service

Chaque appel, sourire, discussion est marketing. Votre comportement, votre allure, votre réputation, ceux de vos collaborateurs sont marketing. Le marketing n’est pas un stylo à votre effigie ou une campagne mail, c’est ce que vous dégagez et communiquez en permanence.

Le mythe du succès instantané

Derrière chaque succès « fulgurant Â», il y a en rĂ©alitĂ© des annĂ©es de tâtonnement et de travail constant. Les quelques « vrais Â» coups d’éclats retombent en gĂ©nĂ©ral aussi vite car fondĂ©s sur des bases trop fragiles. Oubliez le mythe du succès instantanĂ© et tablez sur une croissance progressive et pĂ©renne.

L’embauche

Faites-le d’abord vous-mĂŞme !

Seule la pratique de chaque poste de votre activitĂ© vous donnera la possibilitĂ© d’évaluer en connaissance de cause la difficultĂ© rĂ©elle et les besoins concrets Ă  ce poste. SecrĂ©tariat, standard, marketing, accueil, ne nĂ©gligez ou sous-estimez aucune tâche mĂŞme « hors de votre Ă©lĂ©ment Â».

N’embauchez que si vous y êtes forcé

Ce n’est que lorsque la quantité de travail est ingérable sur une période prolongée qu’il convient d’embaucher, pas avant ou par confort. Demandez-vous toujours si les tâches concernées vont perdurer, et si un changement de logiciel, de matériel, ou de répartition entre le personnel existant suffirait à la pallier.

Laissez filer les as

N’embauchez pas quelqu’un juste parce qu’il est bon, si vous n’avez pas réellement de poste à pourvoir. Intégrer un élément talentueux sans avoir de tâche importante à lui confier fera plus de mal que de bien à votre cabinet.

Comme des Ă©trangers Ă  un cocktail

C’est-Ă -dire une soirĂ©e guindĂ©e oĂą la conversation languit et oĂą la politesse prime sur la franchise : c’est le risque en embauchant trop de nouvelles personnes dans un laps de temps trop court. PrivilĂ©giez le « dĂ®ner entre vieux amis Â», et embauchez lentement, en crĂ©ant une intimitĂ© et une confiance rĂ©elle entre les membres de l’équipe.

Les C.V. sont ridicules 

Peu importent les années d’expérience, peu importent les diplômes. Préférez un candidat qui s’intéresse réellement à votre entreprise, et dont l’attitude et la motivation pallieront l’éventuelle inexpérience. On peut former un employé, pas un caractère.

Embauchez des personnes autonomes

Un employé autonome, c’est plus de travail concret et moins de gestion et de supervision. Une équipe composée de membres autonomes, c’est une répartition naturelle et volontaire des tâches et objectifs, donc plus de fluidité et de productivité.

Embauchez les meilleures plumes

L’écriture en révèle plus que sa fonction première. Une écriture claire et concise révèle une pensée claire et concise. À compétences égales, embauchez toujours la personne dont l’expression écrite est meilleure.

Des employés à l’essai

Un entretien est insuffisant à estimer l’attitude réelle d’un candidat en situation et sa capacité réelle à son poste. Prévoyez toujours une période d’essai et jugez sur pièces avant de vous engager.

La limitation des dégâts

Annoncez vous-mĂŞme vos mauvaises nouvelles

Vos patients vous respecteront davantage si vous vous montrez honnĂŞte, ouvert et ne dĂ©lĂ©guez pas les « mauvaises nouvelles Â» Ă  vos assistants. N’essayez jamais non plus de manipuler la vĂ©ritĂ© ou d’en attĂ©nuer les consĂ©quences.

Les avantages d’une réponse rapide

En matière de service, la rapidité de la réponse (question, demande ou problème) est primordiale. Plus l’interlocuteur attend, plus il se sent méprisé et vous devient hostile.

Sachez vous excuser

PrĂ©senter des excuses signifie assumer pleinement ses torts et manquements. On est dĂ©solĂ©, point, et pas « dĂ©solĂ© SI Â» ou « dĂ©solĂ© MAIS Â». N’utilisez pas le moment de l’excuse pour tenter de justifier ou minimiser ce qui l’entraĂ®ne.

Envoyez tout le monde au front

Limitez au maximum le nombre d’interlocuteurs entre le retour patient et les personnes concernées. Chacun doit avoir accès et pouvoir répondre au positif comme au négatif relatif à son travail.

Respirez par le nez

Souvenez-vous que tout changement, toute innovation entraînera des protestations même seulement de principe, de vos équipes comme des patients. Souvenez-vous également que les protestations se formulent plus haut et plus forts que l’approbation. Ne reculez donc pas trop vite et prenez le temps de mesurer réellement l’ampleur de la contestation avant toute décision ou mot malheureux.

La culture d’entreprise

On ne crée pas une culture

Oubliez les déclarations de mission et autres vœux pieux artificiels et grossiers. Une entreprise nouvelle n’a pas de culture d’entreprise. Une entreprise installée en a une. Et cette culture ne se créée pas en elle-même, elle s’acquiert, comme le respect ou la confiance, au fil du temps.

Changez de cap !

On vous rĂ©pète sans arrĂŞt « d’anticiper Â» : c’est une ânerie. Occupez-vous des situations existantes et ne perdez pas de temps Ă  envisager et rĂ©gler des problèmes ou situations qui n’existent pas encore et n’existeront peut-ĂŞtre jamais. Soyez simplement rĂ©actif et prĂŞt Ă  changer de cap Ă  tout moment lorsqu’une orientation ne fonctionne pas.

Laissez les stars aux autres

La plupart des gens ne demandent qu’à faire du bon travail pour peu qu’on leur propose un environnement le leur permettant. Intéressez-vous plutôt aux conditions de travail de vos employés et à leur bien-être qu’à leurs performances, celles-ci suivront.

Faites confiance

Traitez les gens comme des enfants, ils se comporteront comme des enfants. Ne leur faites pas confiance, ils n’auront pas confiance en vous. Plutôt que de surveiller vos collaborateurs et allonger la liste des interdits, laissez-leur leur autonomie dans la gestion de leur rythme de travail et ne retenez que le résultat, pas les moyens.

Il est cinq heures, tout le monde dehors

Oubliez le mythe de l’employĂ© « motivĂ© Â» qui est serait idĂ©alement trentenaire, cĂ©libataire et sans vie privĂ©e, pouvant passer 14 heures par jour Ă  travailler sans problème. On l’a dit, ce type de travailleur est de loin le moins fiable Ă  long terme. Le but n’est pas de travailler plus, mais de travailler mieux pour que la mĂŞme somme de travail soit achevĂ©e plus tĂ´t. Une mère de famille devant aller chercher ses enfants Ă  17H00 trouvera le moyen de faire avant 16H45 ce que l’employĂ© « motivĂ© Â» fera dans ses « heures supplĂ©mentaires Â».

Ne règlementez pas trop

N’ayez pas le rĂ©flexe « punition collective Â» Ă  la moindre incartade. Si un employĂ© porte un short, n’instaurez pas immĂ©diatement un règlement interne Ă©crit interdisant le short, dites simplement Ă  cet employĂ© d’éviter le short Ă  l’avenir. RĂ©servez les règlements aux vrais problèmes, importants et rĂ©currents, au risque de perdre en crĂ©dibilitĂ© sur ceux-ci s’ils sont noyĂ©s dans la masse d’interdits dĂ©risoires.

Communiquez simplement

Restez vous-même et fuyez le ton ampoulé, paternaliste ou jargonneux, avec vos patients comme avec vos collaborateurs, à l’oral comme à l’écrit. Oubliez les conventions administratives ou les séminaires marketing et leurs discours formatés, et parlez, tout simplement.

Les mots Ă  ne pas utiliser

Certains mots et expressions crĂ©ent une dichotomie immĂ©diate, une urgence qui n’existe pas toujours et ignorent les nuances. « Absolument Â», « impossible Â», « toujours Â» ou « jamais Â» font partie de ces mots gĂ©nĂ©rateurs de stress. De mĂŞme, « facile Â», qui est quasiment systĂ©matiquement employĂ© pour dĂ©crire les tâches des autres et non les siennes.

Ne dites plus jamais « dès que possible Â»

Cette dernière expression est particulièrement absurde lorsqu’elle devient systĂ©matique. Bien sĂ»r que tout ce qui est Ă  faire doit ĂŞtre et sera fait « dès que possible Â». Cela dĂ©value du coup tout ce que l’expression n’accompagne pas, et rend tout prioritaire : si tout est urgent plus rien n’est hiĂ©rarchisĂ©.

En conclusion, s’il ne fallait retenir qu’un principe de cet ouvrage atypique, ce serait le suivant : l’inspiration a une date de pĂ©remption. Si les idĂ©es ne meurent jamais, l’inspiration et la motivation, elles, si. Quoi que vous fassiez, faites-le Ă  100%, faites-le maintenant, pas demain, pas « quand Â» vous aurez le temps, les moyens, l’énergie, non, maintenant, tant que l’inspiration est lĂ . Et faites-le comme vous sentez qu’il faut le faire, pas comme les manuels vous ont dit qu’il fallait le faire !